“Ils sont pleins de vin doux” (Ac 2,13)
Comment ces provinciaux de Galilée pourraient-ils parler d’autres langues ? Comment ces pouilleux du bord du Lac pourraient-ils, au coeur même de la Jérusalem en fête, s’adresser à tant de pèlerins de toutes nations, si le vin ne leur était monté à la tête… Binge drinking [1. Alcoolisation rapide, en bref : Biture pour pisseuses et boutonneux !] à Jérusalem. Le jugement est rapide : ‘Ils sont pleins de vin doux’. Le sentiment (qu’ils sont ivres) l’emporte sur toute recherche de vérité.
Les véritables ivrognes ne sont pas ceux qu’on croit: l’altération du jugement (du discernement) n’est-il pas le propre des effets de l’alcool ? Le sentiment immédiat semble être le critère de vérité. Je dis cela de la vie courante comme de la vie de foi. L’immédiateté, c’est-à-dire le refus de toute médiation temporelle ou/et sociale et/ou évangélique, devient force de loi et parfois force de foi. Car il en est de même de certaines interprétations de cet événement. Le récit de la Pentecôte, ces sortes de langues de feu, ces bruits comme s’il y avait un violent coup de vent, tout cela n’est-il pas extraordinaire ? Devons-nous donc nous enivrer de prodigieux, devenir saoul de Dieu, jusqu’à en perdre la raison ? [Le binge drinking spirituel existe aussi.] Réduire cet évènement à ses effets emplis de merveilleux (ou de suspicions), n’est-ce pas passer à côté de l’essentiel ? J’entends déjà certains me rétorquer : Mais c’est l’Esprit Saint !
“Nous les entendons parler dans nos langues des merveilles de Dieu” (Ac 2,11)
L’Esprit Saint… oui, mais l’expérience spirituelle (au sens de/dans l’Esprit) des disciples ne fait pas l’impasse sur le discernement. Car le récit de la Pentecôte ne se clôt pas avec les effets de l’Esprit Saint. Il demande une interprétation laquelle nous est fournie dans le discours de Pierre qui suit. Ce dernier, dans son exhortation (Ac 2,14-40), veut donner sens à l’événement, et l’on remarquera que, jamais, il ne s’appuie sur les phénomènes extraordinaires qui ont eu lieu. Il ramène l’évènement de la Pentecôte à sa source : Jésus-Christ, dont l’Esprit Saint vient manifester sa présence active au cœur de son Eglise. La Pentecôte est ainsi interprétée à la lumière de la Promesse d’un temps nouveau (v.15-21) inauguré par le Christ dans le mystère de la Croix et de la Résurrection et accomplissant ainsi les Ecritures (v.22-36). Pour faire cours court, l’Esprit Saint donné et reçu promeut le discernement des hommes dans la Foi. Le don de l’Esprit donne la Parole aux disciples, une Parole audible par tous, une Parole qui se fait Dialogue, une Parole qui invite
“Qu’est-ce que cela ?” (Ac 2,12)
“Vos fils et vos filles prophètiseront” (Ac 2,17 / Jl 3,1)