un Pachyderme à Jérusalem ou l’invention du sapin de Noël

PComme je vous le disais, notre aventure à Jérusalem fut une autre histoire que je tiens à vous raconter aujourd’hui. A mesure que nous approchions de la Judée, le nombre de soldats romains rencontrés ne cessaient de croître. Notre hétéroclite équipage ne passait nullement inaperçu aux yeux de ces hommes vêtus de plastrons de cuirs ou métalliques, de tuniques rouges et barbes blanches, armés jusqu’aux dents et parfois montés sur des rennes chevaux. Tous les dix lieues, ils nous demandaient notre destination, le but de notre séjour et nos carnets de vaccination. Quand enfin nous arrivâmes à Jérusalem, les mages décidèrent de se rendre au palais pour rencontrer ce nouveau roi. Enfin, ils allaient rencontrer Celui qu’ils désiraient tant voir et saluer. Hélas, ni moi, ni mon ami le dromadaire, ne pouvions entrer dans cette ville aux rues étroites.

J’aurais tant aimé voir la ville de David, le palais, le Temple… mais nous étions là, seuls, à la porte de la ville, au pied du palais d’Hérode. Mis à part le cheval, qui bien sûr se la jouait le beau destrier, la foule ne cessait de se moquer de nous : mon ‘grand nez’, ma corpulence – non je ne suis pas gros !-, la bosse de mon ami, bon là je comprends… Nonobstant, notre arrivée posait question : qu’étions-nous venus faire ici ? Quels mystérieux dignitaires transportions-nous ? Quel évènement se tramait ?

Eh ho ! Les monstres ! D’où êtes-vous et qu’êtes-vous venus faire ici ? Nous bêla, bêtement, une brebis en balade.
– Dis-donc, la frisée à méchoui, elle peut nous parler sur un autre ton ! répondit mon ami dromadaire.
– Faut pas être susceptible les gars ! Avouez que dans le panorama, certain d’entre vous font tâche !
– Nous sommes venus de loin saluer, votre nouveau roi ! lui rétorquai-je avec fierté.
– Eh ben, vous devez venir de très très loin : c’est qu’il n’est plus tout jeune, Hérode.
– Ah bon ? Alors nous venons pour son fils nouveau-né !
– Bêêêêêê… laissez moi rire ! Ses morveux  de fils sont déjà adultes !
– Pourtant, nos maîtres ont décelé un signe disant qu’un nouveau roi est venu pour Israël !

La brebis devint alors pensive, et tout bas, nous dit :
– J’le connais votre roi : j’arrive de le voir ! Mais je vous préviens : vous risquez d’être surpris !
– Ah ?
– Oui, il n’est pas ici. Il faut que vous alliez à Bethléem pour le voir…  je ne vous en dis pas plus, et chut ! Pas un mot ! Si Hérode apprend qu’un nouveau roi est né… je ne donne pas cher de son avenir ! Bon allez, je file, j’ai rendez-vous au Temple : il paraît que ça va être ma fête !

– Mais, nos maîtres sont déjà chez Hérode ! dit le cheval. Il faut les prévenir !
Oui mais comment ? On ne peut entrer comme ça dans le Palais ! S’inquiéta le chameau.
– J’ai une idée, dis-je. Trouvez-moi des branchages, du foin, du bois et du feu. Prenez-en autant que vous pouvez.

Ainsi fait, je demandais à mes amis de se camoufler avec les branches. Puis le chameau grimpa sur mon dos, et le cheval sur la bosse de ce dernier. Malgré un équilibre instable, notre déguisement fut efficace : les passants nous prenaient pour un sapin récemment planté (depuis la tradition veut que l’on érige un sapin à l’occasion de Noël).

Je les vois ! Je les vois ! dit alors le cheval dont la tête dépassait juste le haut des remparts. Ils sont encore dans la cour.

Le cheval ne cessait de hennir pour capter leur attention, mais rien n’y fit. Alors, j’enflammai une torche, et l’expulsai par-dessus le rempart. En voyant leur habituelle étoile, sans doute se précipiteraient-ils à l’extérieur.

Trop tard, nous dit le cheval. Ils sont entrés dans le Palais.

Dépités, nous n’avions plus qu’à attendre leur sortie.

(suite au prochain épisode).

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