“Les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l’écouter. Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : « Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux ! » Alors Jésus leur dit cette parabole : « Un homme avait deux fils...” (Lc 15,11-32)
Encore une histoire de frères et de père, de fâcheries, et de retrouvailles…. la parabole des deux fils rejoint en bien des points l’histoire de Joseph, de ses frères et de Jacob. Mais si Joseph était une victime innocente, le fils cadet de notre parabole s’est mis, de lui-même, dans un foutu pétrin. Que lui a-t-il pris ?
Demander sa part d’héritage à un père encore en vie : c’est, d’une certaine manière, le considérer comme mort. Le cadet veut son indépendance, loin, très loin, du père et du frère, vivre sa propre vie, autonome, en dépensant un héritage qui aurait dû être ce don et cette transmission d’une Histoire d’Amour : celle de son père, de sa famille. Mais dans les mains du cadet, l’héritage devient un argument pécuniaire de liberté : Ni Dieu, Ni Père, Ni frère, aurait-il pu taguer sur la porte de la maison familiale.
Et cette liberté devient gaspillage, une consommation effrénée avant l’heure. L’attirance de la richesse, des paillettes, des strass, de la réussite… C’est quand même mieux que de vivoter auprès de Papa, pensait-il. Mais cette débauche économique et futile ne guérit pas sa faim, bien au contraire.
De ce fils indigne, nous pourrions penser qu’il a mérité son sort, à l’instar des scribes et des pharisiens de l’évangile. Bien fait ! Désormais qu’il bosse pour gagner sa vie, cela lui fera les pieds ! Or pas un de ces mots, ne vient dans la bouche du père. Jamais, il n’a considéré son cadet autrement comme un fils. Même indigne, il demeure fils, et lui, toujours Père. Pas de punition, de vengeance, au grand dam de l’aîné, le fils fidèle. Non, depuis le début, le père attend, observe chaque jour au loin, espère son retour. L’amour du Père est persévérant. Bien plus, à ce fils qui était parti chercher des richesses illusoires, le père donne sa propre richesse : un beau vêtement, une bague, des sandales et un repas somptueux et joyeux.
La véritable richesse est bien dans cette patience amoureuse du Père qui nous offre ce qu’il a de plus précieux : la tunique du Baptême, la bague de son Alliance, les sandales de sa Mission, son repas eucharistique, et par-dessus tout son pardon.