Jésus expulsait un démon qui rendait un homme muet. Lorsque le démon fut sorti, le muet se mit à parler, et la foule fut dans l’admiration. Mais certains se mirent à dire : « C’est par Béelzéboul, le chef des démons, qu’il expulse les démons. » D’autres, pour le mettre à l’épreuve, lui réclamaient un signe venant du ciel. (Lc 11,14-23)
Alors que beaucoup se réjouissent, sont dans l’admiration, la guérison de Jésus suscite chez quelques uns la suspicion et révèle leur insatisfaction. Croit-il nous impressionner ? Veut-il attirer à lui les foules par ses actes miraculeux ?
Pour les uns, Jésus n’en a pas fait assez : un vrai Messie ferait pleuvoir du pain du Ciel, ouvrirait la mer en deux. Cette guérison à deux balles ne les impressionne pas ; ils sont capables, eux ou leurs disciples, d’en faire autant : Et si c’est par Béelzéboul que moi, je les expulse, vos disciples, par qui les expulsent-ils ? Pour les autres, Jésus n’est qu’un dangereux usurpateur. Pour eux, les miracles sont un stratagème malin qui détournent la foule. S’il expulse les démons, c’est qu’il a pouvoir sur eux, comme chef des démons… Bref, il travaillerait pour sa propre chapelle ! Donc, ou bien Jésus en fait trop, ou pas assez, pas assez à droite ou trop à gauche, et inversement… en tout cas, il ne va pas dans LEUR sens.
Mais ni les uns, ni les autres ne s’intéressent au muet guéri : il est passé aux oubliettes. Les uns comme les autres s’intéressent au fait miraculeux, et non à la personne guérie. Il fut muet, mais leur insatisfaction, ne nous permet pas de l’entendre. Leurs récriminations d’insatisfaits, imbus d’eux-mêmes, étouffent la parole de celui qui devrait parler. Leur insatisfaction est l’expression d’une volonté de mettre la main sur Jésus, d’avoir de l’emprise sur lui ou pour se l’accaparer ou pour s’en détourner. Non, Jésus ne va pas dans LEUR sens, il va dans le sens du Règne de Dieu, du relèvement, du rassemblement du Peuple autour de son Christ. Celui qui ne rassemble pas avec moi disperse. Or en donnant la Parole à un muet, Jésus vient le rétablir dans un dialogue possible et bénéfique autant avec Dieu, qu’avec ses frères. Jésus ne met aucune emprise sur l’homme guéri, au contraire il le libère. La guérison ne sert pas la messianité de Jésus, c’est Jésus qui sert la Parole, là où les propos de nos insatisfaits enferment, condamnent… mais ne sont pas PAROLE. Qui sont donc les muets de l’histoire ?