Parallèles : Mt 24,1-3 | Lc 21,5-7
C’est la sortie du Temple pour Jésus et ses disciples. Ils s’éloignent de ce lieu et surtout de ces notables, grands prêtres, scribes, anciens, pharisiens, hérodiens et sadducéens, ayant tous tenté de le faire chuter, vainement. La pierre rejetée par les bâtisseurs a tenu bon (12,10).
Sortir du Temple (13,1-5a)
Mc 13, 1 Comme Jésus sortait du Temple, un de ses disciples lui dit : « Maître, regarde : quelles belles pierres ! quelles constructions ! » 2 Mais Jésus lui dit : « Tu vois ces grandes constructions ? Il ne restera pas ici pierre sur pierre ; tout sera détruit. » 3 Et comme il s’était assis au mont des Oliviers, en face du Temple, Pierre, Jacques, Jean et André l’interrogeaient à l’écart : 4 « Dis-nous quand cela arrivera et quel sera le signe donné lorsque tout cela va se terminer. » 5 Alors Jésus se mit à leur dire : « Prenez garde…
De l’admiration à la stupéfaction
Jésus sort du Temple. Les changeurs, les marchands de bêtes et de colombes sont probablement revenus mais lui n’y reviendra plus. Sa Passion approche. Jésus et ses disciples sortent du Temple. Une autre maison de prière pour toutes les nations (11,17) et une autre offrande attend Israël et le monde.
Lors de sa première venue au Temple, le regard silencieux de Jésus avait rempli l’intérieur du lieu saint (11,11). Comme en contraste, alors qu’il quitte l’édifice, le regard admiratif d’un de ces disciples se remplit de sa magnificence extérieure et sa richesse apparente. Jésus vient pourtant de dénoncer devant eux l’orgueil et la mondanité des scribes ainsi que l’offrande d’une pauvre veuve au milieu de riches donateurs. Une fois de plus, les disciples demeurent dans l’incompréhension. Certes, le Temple représente tout autre chose que la vanité des hommes. Lieu emblématique et somptueux de la foi d’Israël, il est, par excellence, le lieu de prière et de pardon entre l’unique Dieu et son peuple, le lieu de l’assemblée pour cette fête de Pâque qui approche. Cependant, même ces saintes pierres sont destinées à tomber. Toutes seront détruites, telles les tables des changeurs, tel un figuier asséché. L’admiration laisse place à la stupéfaction. Et le figuier à l’olivier.
Au mont des Oliviers
Jésus prend le chemin inverse de son accueil triomphal (11,1-11). Retour à ce mont des Oliviers, sans ânon mais toujours avec ses disciples. Pour la première fois nous retrouvons les quatre premiers appelés. André, dont nous n’avions plus entendu parler, a rejoint le groupe des trois proches : Pierre, Jacques et Jean1. Jésus s’adresse à eux seuls, à l’écart, dans cette intimité où il réunit souvent ses disciples. Eux, ces pêcheurs d’hommes qui pour suivre Jésus ont tout laissé et qui y laisseront jusqu’à leur vie, comme leur annoncera Jésus dans son enseignement. Ils sont face au Temple et leurs regards embrassent le lieu saint et la ville de David qu’ils peuvent contempler depuis ce mont des Oliviers.
Face au Temple
L’inquiétude des disciples fait suite à la réflexion de leur Seigneur sur le Temple : Quand cela arrivera ? Quel signe ? Jésus annonce une fin dramatique pour le Temple et donc pour tout Israël. Le Temple promis à David, construit par Salomon, a déjà connu une destruction lors de la prise de Nabuchodonosor et l’exil de nombreux notables en Mésopotamie (en 597 av. J.-C.) avant d’être rebâti sous Esdras et Néhémie (en 516). Hérode le grand (en 19 av. J.-C.) investira de lourds et fabuleux travaux d’agrandissement et d’embellissement qui se poursuivent encore au temps de Jésus et ne prendront fin qu’en 63 apr. J.C. Mais tout cela vient à sa fin.
L’évocation d’un signe, par lequel s’annoncerait la fin du Temple, permet aux disciples d’associer cette ruine du Temple au dessein divin. Mais en quels termes ? L’avènement du Jugement et du règne de Dieu s’accompagnerait-il de la destruction de son Temple ? Jésus ayant déjà promis aux scribes une condamnation plus sévère (12,40), la colère de Dieu s’enflammerait-elle contre sa maison devenue caverne de bandits ? Jésus n’ira pas dans ce sens2.
Prenez garde !
Prenez garde ! Ce sont les premiers mots du plus long enseignement de Jésus à ses disciples dans l’évangile selon Marc. Ces trente-sept versets sont encadrés par le récit de la veuve et sa pauvre obole (12,41-44) et celui de la femme oignant Jésus avec un parfum coûteux (14,1-11). Deux récits d’offrande. L’ensemble de ce chapitre 13 constitue un long discours charnière entre le ministère de Jésus et sa Passion. Un discours qui contrairement aux attentes de ses disciples concerne plus leur fin, leur propre offrande, que celui du Temple. C’est la vie du disciple présent et à venir qui est en jeu, une vie parfois malmenée au milieu des tribulations du monde, et parfois victime de la colère des hommes. Prenez garde ! Les disciples sont l’enjeu même des paroles de Jésus qui souhaite les préserver dans sa fidélité. Car la venue du Fils de l’homme, sa mort et sa Résurrection risquent de bouleverser leur monde tranquille, tout comme leurs certitudes.
- Pour mémoire : Pierre, Jacques et Jean sont ceux des disciples invités, seuls, à monter avec Jésus auprès de la fille de Jaïre (5,37) ; ou sur la montagne de la Transfiguration (9,2). ↩︎
- Qu’il ait écrit au moment de la révolte juive et de la destruction du Temple en 70, ou peu avant, Marc évite à ses lecteurs de voir en la chute, prochaine ou effective, du Temple une vengeance de Dieu qui contredirait la Bonne Nouvelle de Jésus. Sa communauté chrétienne, qui subit elle-même des persécutions violentes de la part du pouvoir romain, n’est pas la victime d’une colère divine. ↩︎