1er dimanche de l’Avent (Année A)
Le mot ‘paix’ est un terme très présent dans ces lectures du dimanche, en creux comme en plein. Isaïe (2,4) déclare ainsi : Jamais nation contre nation ne lèvera l’épée ; ils n’apprendront plus la guerre. Le psaume 121 (122) affirme de son côté : À cause de mes frères et de mes proches, je dirai : « Paix sur toi ! ». Vœux pieux ? D’autant que paradoxalement l’évangile du dimanche reprend un passage du discours apocalyptique de Jésus dans l’évangile selon Matthieu (24,37-44).
La fin d’un monde
Comme il en fut aux jours de Noé, ainsi en sera-t-il lors de la venue du Fils de l’homme. En ces jours-là, avant le déluge, on mangeait et on buvait, on prenait femme et on prenait mari, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche ; les gens ne se sont doutés de rien, jusqu’à ce que survienne le déluge qui les a tous engloutis : telle sera aussi la venue du Fils de l’homme.
D’un côté donc la paix demandée, et de l’autre le jugement et la fin annoncée d’un monde. C’est peut-être là d’ailleurs le point commun. En Isaïe, la paix attendue est bien celle qui vient après la fin d’un temps de guerre et de violence, dans l’espérance d’un renouveau de paix. Et la fin d’un monde, selon Matthieu, est justement inaugurée par cet avènement du fils de l’homme que la croix du Christ rendra visible. L’Avent nous invite à cette veille, à ce désir éclairé d’un renouvellement du monde, toujours.
Le discours de Jésus s’appuie sur le récit de Noé (Gn 6-9), l’homme juste vivant dans un monde de violence extrême et de confusion. L’homme juste, pacifique et fidèle qui a mis sans foi, sans compromission et dans la persévérance, en la Parole de Dieu. Avec le déluge, c’est la haine et la violence que Dieu vient effacer au profit de l’Alliance et de la Paix. Avec la croix, il en sera de même comme en témoignera l’épître aux Éphésiens : Christ a voulu créer en lui un seul Homme nouveau en faisant la paix, et réconcilier avec Dieu les uns et les autres en un seul corps par le moyen de la croix ; en sa personne, il a tué la haine. Ep 2,15-15. La fin d’un monde, loin de tout catastrophisme, correspond à l’avènement (l’Avent) d’une nouvelle création, d’un monde renouvelé dans la paix voulue par Dieu.
Forger la paix de nos mains
Vœu pieux disais-je ? Sans doute beaucoup que nos intentions de prières universelles. Car la paix de Dieu embarque le croyant dans une démarche active. Noé n’a-t-il pas, sur la Parole de Dieu, construit cette arche de ses propres mains ? Il a veillé et surveillé autant le ciel que la progression de son ouvrage. C’est en ce sens, à l’image de Noé, que Jésus demande à ses disciples : Veillez donc, car vous ne savez pas quel jour votre Seigneur vient.
Pour Isaïe le veilleur de paix est à l’image du forgeron : De leurs épées, ils forgeront des socs, et de leurs lances, des faucilles. Sous le feu de la parole de Dieu, ce qui tue, ce qui détruit, devient ce qui sème et ce qui récolte pour le bien de tous. La paix se forge aussi avec aux mains mêmes des croyants. Et cette paix à construire passe d’abord par sa propre conversion, la forge du croyant lui-même. Saint Paul dans la lecture de la lettre aux Romains dit à ce propos : La nuit est bientôt finie, le jour est tout proche. Rejetons les œuvres des ténèbres, revêtons-nous des armes de la lumière. Conduisons-nous honnêtement, comme on le fait en plein jour… (Rm 13,11-14a).
Toucher la paix
Qui ne voudrait pas la paix ? Trop souvent on l’associe à l’absence de conflit et la gestion du silence. Avoir la paix. Être en paix. Sans problème, sans souci… seul ou avec des gens conciliants. Mais les textes du jour, nous font toucher la Paix de nos mains rudes ou maladroites. Cette paix intérieure à construire, à convertir, à partager et à transmettre. Cette paix fraternelle à recevoir et à cultiver, non sans mal, il est vrai. Mais elle est cette paix que Dieu offre jusque sur la croix. Une paix qui nous attire et nous déplace toujours : Venez, maison de Jacob ! Marchons à la lumière du Seigneur (Is 2,5) Une paix qui nous oblige à toucher les frères et sœurs que Dieu nous donne :
À cause de mes frères et de mes proches,
je dirai : « Paix sur toi ! »
À cause de la maison du Seigneur notre Dieu,
je désire ton bien. Ps 121(122).