Textes pour le dimanche de la Sainte Trinité (A)
C’est une forte et triste tentation : expliquer le mystère Trinité à partir de l’arithmétique ou la physique quantique pour montrer combien 3 x 1= 1. Une autre tentation consiste à puiser dans l’allégorie et la métaphore pour raconter le 3 en 1, le packaging divin. En réalité, la bonne question n’est pas « Comment expliquer la Trinité ? » mais « Que nous dit ce mystère ? Que révèle-t-il de Dieu ? » Les textes de ce dimanche peuvent-ils nous aider à y répondre ?
Moïse au mont Sinaï
Ex 34 4 Moïse tailla deux tables de pierre semblables aux premières. Il se leva de bon matin, et il gravit la montagne du Sinaï comme le Seigneur le lui avait ordonné. Il emportait les deux tables de pierre. 5 Le Seigneur descendit dans la nuée et vint se placer là, auprès de Moïse. Il proclama son nom qui est : LE SEIGNEUR. 6 Il passa devant Moïse et proclama : « LE SEIGNEUR, LE SEIGNEUR, Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité, 7 qui garde sa fidélité jusqu’à la millième génération, supporte faute, transgression et péché, mais ne laisse rien passer, car il punit la faute des pères sur les fils et les petits-fils, jusqu’à la troisième et la quatrième génération. » 8 Aussitôt Moïse s’inclina jusqu’à terre et se prosterna. 9 Il dit : « S’il est vrai, mon Seigneur, que j’ai trouvé grâce à tes yeux, daigne marcher au milieu de nous. Oui, c’est un peuple à la nuque raide ; mais tu pardonneras nos fautes et nos péchés, et tu feras de nous ton héritage. »
Une Alliance
Ce passage du livre de l’Exode précède l’Alliance conclue entre Dieu et son peuple, les fils d’Israël. Il en donne le cadre général mais présente ce Dieu de Moïse. On y voit l’importance des deux tables de pierre. Celles-ci sont vierges. Les premières où étaient inscrits les commandements de Dieu, Moïse les brisa face au veau d’or (Ex 32 ). Deux tables de pierre, vierge mais tout aussi lourde, que Moïse transporte de bon matin vers le sommet du Sinaï. Tout est à écrire, mais plus de la même manière. L’instant pourrait grave et sévère. Mais c’est un Dieu léger qui vient comme s’asseoir auprès de Moïse. Un Dieu lent à la colère, patient devant les fautes de son peuple.
Le récit souligne combien Dieu n’est pas à l’image des idoles et de ce veau figé dans l’or que tous ont vénéré. Dieu se révèle – dans cet instant où tous pourraient craindre sa colère – éminemment compatissant. Il ne se révèlera pas seulement dans le pardon, demandé par Moïse, mais dans l’Alliance, l’union scellé entre le Seigneur de la Loi et un peuple à la nuque raide. Dieu se risque à aimer l’improbable. C’est en cela qu’il est unique. Insaisissable, il n’est pas fait d’or, ni monolithique. Il est « plein d’amour ». Tout est amour en lui, le Père, le Fils et l’Esprit. Tout est amour à donner.
L’amour pour sauver
Jn 3 16 Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. 17 Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. 18 Celui qui croit en lui échappe au Jugement ; celui qui ne croit pas est déjà jugé, du fait qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu.
Tout (se) donner
C’est face à Nicodème, un maître qui enseigne les « tables » de la Loi, que Jésus tient cette parole. Il y a de l’amour en Dieu, dit-il, un amour qui n’est pas égoïste, tourné vers Lui seul ou seulement vers son Fils. Dieu n’est pas solitaire titrait le théologien Jean-Noël Bezançon dans un éclairant ouvrage de vulgarisation.
Tout est donné pour sauver ce qui peut apparaître, aux yeux d’un dieu, méprisable. Le monde a mauvaise presse… mais il est aimé malgré tout. Ce Dieu d’Alliance fera tout pour lui, jusqu’à envoyer ce qu’il a de plus cher, de plus précieux : son propre Fils. Et ce dernier n’aura de cesse de montrer combien Dieu veut sauver ce monde, combien il est prêt à se mettre en trois pour le relever. Et le Fils ira par amour jusqu’au bout de sa mission, jusqu’à se donner à la croix pour montrer ce visage d’un Dieu Père. Et non pour condamner mais pour aimer encore, sauver de la haine, du mépris, et de la mort. Tout est donné, jusqu’à l’Esprit, pour que le monde vive comme il a été crée : en paix, à l’image de Dieu.
Frères…
2 Co 13 11 Frères, soyez dans la joie, cherchez la perfection, encouragez-vous, soyez d’accord entre vous, vivez en paix, et le Dieu d’amour et de paix sera avec vous. 12 Saluez-vous les uns les autres par un baiser de paix. Tous les fidèles vous saluent. 13 Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu et la communion du Saint-Esprit soient avec vous tous.
Grâce, amour et communion
Jésus-Christ, Dieu, le Saint Esprit… tout cela parait très divers et même peut-être opposable. Mais c’est peut-être cette diversité de Dieu, cette Trinité, qui nous dit le projet divin pour son peuple. Dans cette salutation finale, Saint Paul l’exprime à sa manière. La communauté ecclésiale est aussi diverse, mais elle est aussi appelée à vivre de la même unité, à puiser en elle la grâce, l’amour et la communion. Certes, Paul associe ces vertus à chacune des personnes, mais elles pourraient convenir aussi bien à l’un qu’à l’autre. Il n’y a pas de domaine réservé en Dieu. Bien plus, grâce, amour et communion sont un seul et même mot qui porte le nom de « paix », ce projet de Dieu pour sa création.