18ème dim. Ord. (B) Jn 6,24-35
Les disciples ont embarqué pour Capharnaüm et Jésus, les a rejoints en marchant sur les eaux. Une autre aventure missionnaire aurait pu commencer, si l’évangéliste ne nous avait laissé avec la foule, repue de pains et de poissons, mais livrée à elle-même. Cette foule, qui s’est « multipliée » par la venue d’autres personnes (6,23), cherche maintenant à retrouver Jésus, mais pour quels motifs ?
Vous me cherchez (6,24-27)
Jn 6, 24 Quand la foule vit que Jésus n’était pas là, ni ses disciples, les gens montèrent dans les barques et se dirigèrent vers Capharnaüm à la recherche de Jésus. 25 L’ayant trouvé sur l’autre rive, ils lui dirent : « Rabbi, quand es-tu arrivé ici ? » 26 Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : vous me cherchez, non parce que vous avez vu des signes, mais parce que vous avez mangé de ces pains et que vous avez été rassasiés. 27 Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle, celle que vous donnera le Fils de l’homme, lui que Dieu, le Père, a marqué de son sceau. »
Rabbi, quand es-tu arrivé ici ?
La présence de Jésus à Capharnaüm interroge : ils ne l’ont pas vu prendre la barque, ni marcher sur les eaux. Ce rabbi serait-il vraiment le Prophète annoncé et qui vient dans le monde (6,14), capable de grands signes et de satisfaire l’attente des Fils d’Israël ? La foule se focalise sur les effets visibles et bénéfiques des actes de Jésus qui répondrait à l’attente messianique. Ce ne sont plus seulement les guérisons d’un thaumaturge qu’ils reconnaissent (6,2) mais ce Messie, exprimant la justice de Dieu à travers ces pains multipliés dont ils furent rassasiés (6,26). Et lorsque le Prophète messianique arrive, il doit accomplir de grandes choses pour le peuple de Dieu.
Parce que vous avez mangé
La réponse de Jésus a de quoi surprendre en renvoyant les gens à leurs propres œuvres : travaillez. Cette œuvre se résume ici en une chose : accueillir la nourriture qui demeure, une nourriture donnée par le Fils de l’homme. La foule s’est focalisée sur le repas d’hier en oubliant ce surplus qui demeure aujourd’hui et qui lui sera donné : la surabondance de sa grâce. Ils ont mangé et furent rassasiés, mais cette nourriture est périssable. C’est ce don du pain véritable qui accomplit, de manière officielle, par le sceau, la volonté du Père.
Que devons-nous faire ? (6,28-33)
6, 28 Ils lui dirent alors : « Que devons-nous faire pour travailler aux œuvres de Dieu ? » 29 Jésus leur répondit : « L’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. » 30 Ils lui dirent alors : « Quel signe vas-tu accomplir pour que nous puissions le voir, et te croire ? Quelle œuvre vas-tu faire ? 31 Au désert, nos pères ont mangé la manne ; comme dit l’Écriture : Il leur a donné à manger le pain venu du ciel. » 32 Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain venu du ciel ; c’est mon Père qui vous donne le vrai pain venu du ciel. 33 Car le pain de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et qui donne la vie au monde. »
Croire au vrai pain
La foule acquiesce à la proposition de Jésus. Mais, à cette promesse du don de Dieu, elle associe un mérite : Que devons-nous faire ? Tout serait-il dans le faire et la nourriture éternelle, promise, une récompense en fonction des mérites ? Jésus inverse la proposition, l’œuvre de Dieu devient première et le faire devient croire. L’accueil de l’envoyé du Père ne représente pas une récompense mais elle est une priorité nécessaire. Goûter une nourriture qui demeure, qui rassasie à jamais, n’est pas de l’ordre d’une juste rémunération, mais la conséquence de la foi. C’est n’est pas l’homme qui monte vers Dieu à la force du poignet, mais Dieu qui prend l’initiative de descendre du ciel pour donner vie à celui qui croit. C’est Dieu qui agit en premier, comme un bon Père aimant, et non uniquement pour les plus méritoires de ses enfants, mais pour donner vie au monde, à tous. Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle Jn 3,16.
Donne-nous toujours de ce pain-là (6,34-40)
6, 34 Ils lui dirent alors : « Seigneur, donne-nous toujours de ce pain-là. » 35 Jésus leur répondit : « Moi, je suis le pain de la vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif. 36 Mais je vous l’ai déjà dit : vous avez vu, et pourtant vous ne croyez pas. 37 Tous ceux que me donne le Père viendront jusqu’à moi ; et celui qui vient à moi, je ne vais pas le jeter dehors. 38 Car je suis descendu du ciel pour faire non pas ma volonté, mais la volonté de Celui qui m’a envoyé. 39 Or, telle est la volonté de Celui qui m’a envoyé : que je ne perde aucun de ceux qu’il m’a donnés, mais que je les ressuscite au dernier jour. 40 Telle est la volonté de mon Père : que celui qui voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. »
Le pain de la Parole
La question de la foule rejoint celle de la Samaritaine à Jésus : Seigneur, donne-moi de cette eau, que je n’aie plus soif, et que je n’aie plus à venir ici pour puiser. Jn 4,15 … Une nouvelle manne est attendue, permanente et définitive. Si Dieu a sauvé son peuple de la faim durant le temps de l’Exode, voici que s’annonce désormais une nourriture plus vitale encore que l’aliment, car l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui vient de la bouche du Seigneur (Dt 8,3). Ce pain de la parole de vie désigne la faveur de Dieu pour ses fidèles, sa présence actuelle et créatrice au sein de son Peuple pour le consoler, le renouveler et le combler généreusement de bénédictions. Jésus se propose ici comme source et don gracieux pour ce bonheur impérissable. Mais ce don salvifique ne peut-être compris qu’à la lumière du mystère pascal comme l’évoque la double mention du verbe ressusciter.