La métaphore sur la vigne et les sarments insistait sur le lien vital unissant le Christ à la communauté des disciples. Mais cette vigne n’est pas isolée du monde qui l’environne. Un monde dans lequel règne parfois la haine à son encontre.
Si le monde a de la haine contre vous (15,18-21)
Jn 15, 18 Si le monde a de la haine contre vous, sachez qu’il en a eu d’abord contre moi. 19 Si vous apparteniez au monde, le monde aimerait ce qui est à lui. Mais vous n’appartenez pas au monde, puisque je vous ai choisis en vous prenant dans le monde ; voilà pourquoi le monde a de la haine contre vous. 20 Rappelez-vous la parole que je vous ai dite : un serviteur n’est pas plus grand que son maître. Si l’on m’a persécuté, on vous persécutera, vous aussi. Si l’on a gardé ma parole, on gardera aussi la vôtre. 21 Les gens vous traiteront ainsi à cause de mon nom, parce qu’ils ne connaissent pas Celui qui m’a envoyé.
Ce monde de haine
Le discours de l’évangile s’adresse à cette communauté post-pascale de disciples confrontés à un monde de haine. Ce monde, désigné par l’évangéliste, représente l’espace religieux où la figure du Christ, Fils de Dieu, est rejetée. C’est le monde de celles et ceux qui s’opposent à l’évangile, notamment au sein de la sphère du judaïsme dans lequel évolue la communauté johannique. Le passage fait ainsi mention de leur Loi (15,25).
Ce monde de haine est, d’abord, celui des responsables des synagogues qui ont exclu les membres des communautés johanniques. Dans l’évangile, ils se rapprochent de l’attitude des pharisiens et des responsables du Temple. Mais ce monde désigne, aussi, celles et ceux qui refuse la profession de foi d’un Christ, Verbe fait chair (1,14), Fils et envoyé du Père dans le monde (1,9-10), livré pour que le monde soit sauvé (3,14). L’évangéliste nous avait déjà présenté ceux avaient suivi Jésus mais qui, à l’écoute de ses paroles et à l’annonce de la Passion, quittent le champs des disciples et finissent par s’y opposer (6,64 ; 8,31).
À l’amour des disciples (15, 9-17) s’oppose la haine de ce monde, que ce soit envers le Fils (15,18), le Père (15,24) ou les disciples (15,18-19).
Vous n’êtes pas du monde
Ainsi, l’attachement au Christ, cep de Dieu, engendre une communauté de destin. Le rejet du Christ, rapporté dans l’évangile, est aussi la réalité vécue par les disciples contemporains de l’évangéliste, à cause de son nom. Leur élection, l’ accueil de sa grâce, les mettent ainsi face à ce monde de haine. Ils n’appartiennent pas au monde, mais au Christ qui les a choisis. Ils ne sont pas du monde, quoi qu’y vivant, mais ils sont les amis du Christ, se recevant de son amour. C’est ce lien qui les caractérise et c’est cette qualité de relation à Dieu, et entre eux, qui les distinguent de ce monde.
A présent, ils ont vu (15,22-25)
15, 22 Si je n’étais pas venu, si je ne leur avais pas parlé, ils n’auraient pas de péché ; mais à présent ils sont sans excuse pour leur péché.23 Celui qui a de la haine contre moi a de la haine aussi contre mon Père. 24 Si je n’avais pas fait parmi eux ces œuvres que personne d’autre n’a faites, ils n’auraient pas de péché. Mais à présent, ils ont vu, et ils sont remplis de haine contre moi et contre mon Père. 25 Ainsi s’est accomplie cette parole écrite dans leur Loi : Ils m’ont haï sans raison.
Le Christ révélateur du péché de ce monde
La présence du Christ, la permanence de ses paroles et sa mission, toujours actuelles par la vie de sa communauté, révèlent à ce monde son péché. Ce dernier terme ne définit pas une attitude moral, et ne désigne pas seulement la violence qui pourrait découler de la haine. Le péché recouvre ici son acception fondamentale et théologale qui consiste à se refuser au dessein de Dieu. Ainsi, en montrant leur haine envers le Christ, mais aussi envers sa communauté, ils s’opposent à l’amour même de Dieu que le Jésus vient révéler jusqu’à la croix et que l’amour mutuel des disciples manifeste.
Le Christ, inséparable de sa communauté, est ainsi dans la situation du juste haï et persécuté, figure récurrente des psaumes. Un figure pleine d’Espérance, c’est ce juste abandonné que Dieu relève.
- Ps 34 19 Qu’ils n’aient plus à rire de moi, ceux qui me haïssent injustement ! Et ceux qui me détestent sans raison, qu’ils cessent leurs clins d’œil ! 20 Ils n’ont jamais une parole de paix, ils calomnient les gens tranquilles du pays.
- Ps 68, 5 Plus abondants que les cheveux de ma tête, ceux qui m’en veulent sans raison ; ils sont nombreux, mes détracteurs, à me haïr injustement. Moi qui n’ai rien volé, que devrai-je rendre ?
Le discours de Jésus vient ici soutenir une communauté fragilisée par des oppositions de plus en plus virulentes. Le Christ se place d’emblée à ses côtés, et l’Écriture vient lui donner raison. Bien plus, le don de l’Esprit Saint de Dieu sera le meilleur défenseur des disciples, pour qu’ils demeurent toujours unis, et pleins de confiance (cf. 15,26-16,15).